
Presque une décennie après leur départ, des familles de la communauté Hutu regagnent progressivement certaines localités du sud de Lubero, dans la province du Nord-Kivu. Ce retour, observé notamment dans les villages de Louofu (groupements Tama et Itala), se fait sous l’égide du groupe armé M23/AFC qui contrôle la région.
Le 31 juillet 2025, une trentaine de familles ont été publiquement présentées par l’administration du M23/AFC lors d’une cérémonie qualifiée de « réinstallation ». Ces familles déclarent revenir sur leurs terres natales quittées à l’époque en raison de conflits intercommunautaires.
La société civile du territoire de Lubero exprime de vives inquiétudes, dénonçant une opération précipitée et non encadrée. Son président, Muhindo Tafuteni, critique une démarche unilatérale, menée sans concertation avec les autorités locales ni les organismes humanitaires compétents. Il redoute une instabilité croissante et souligne l’absence de préparation sur les plans logistique et social, notamment le manque de terres et d’habitations disponibles.
Des observateurs rappellent que tout retour de déplacés ou de réfugiés doit respecter des normes internationales, telles que celles de l’accord de Washington, qui exige un processus volontaire, sécurisé, et encadré par des institutions comme le HCR, le CICR et les gouvernements concernés. À ce jour, aucune organisation humanitaire officielle n’a confirmé son implication dans cette initiative.
La société civile craint que cette réinstallation non coordonnée ne compromette les efforts de paix en cours, notamment ceux menés à Washington et Doha, et ne ravive les tensions intercommunautaires. Elle demande l’arrêt immédiat de toute opération non encadrée et appelle à une approche inclusive impliquant toutes les parties prenantes. Une réponse coordonnée est réclamée, incluant des mesures de sécurité, un accompagnement humanitaire et la promotion de la cohabitation pacifique.
Au-delà des considérations politiques, le retour de ces familles soulève des enjeux humanitaires majeurs. Accès à la santé, à l’éducation, à l’eau potable, au logement et à la sécurité demeurent des besoins cruciaux. Des ONG et représentants locaux demandent une évaluation indépendante de la situation et l’ouverture d’un dialogue communautaire pour prévenir tout risque de nouvelle crise.
Justin Mupanya